La légalité du permis de construire modificatif délivré en vue de régulariser un permis de construire initial s’apprécie en tenant compte de l’évolution de la règle de droit mais aussi le changement des circonstances de fait existantes à la date de son adoption.
CE, 10 octobre 2022, req. n° 451530
Il est constant que l’obtention d’un arrêté de permis modificatif permet de purger les irrégularités de forme ou de fond affectant le permis initial.
Dans cet arrêt, le Conseil d’État admet que le permis modificatif puisse également acter d’une évolution des circonstances de fait venant conforter la légalité du projet.
Extrait de l’arrêt :
« 4. Lorsqu’une autorisation d’urbanisme a été délivrée en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l’utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance de l’autorisation, l’illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d’une autorisation modificative dès lors que celle-ci assure le respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédée de l’exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises. Elle peut, de même, être régularisée par une autorisation modificative si la règle relative à l’utilisation du sol qui était méconnue par l’autorisation initiale a été entretemps modifiée ou si cette règle ne peut plus être regardée comme méconnue par l’effet d’un changement dans les circonstances de fait de l’espèce. Les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l’appui d’un recours pour excès de pouvoir dirigé contre l’autorisation initiale.
5. Ainsi, le juge administratif saisi de la contestation de la légalité d’une autorisation d’urbanisme initiale ayant fait l’objet d’une autorisation modificative doit, pour apprécier s’il y a lieu le respect par le projet des dispositions du I de l’article L. 146-4 du code de l’urbanisme ou, depuis le 1er janvier 2016, de l’article L. 121-8 de ce code, rechercher si, à la date de la délivrance de l’autorisation modificative, les constructions projetées se trouvent en continuité avec des zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions.
6. Il résulte de ce qui vient d’être dit que la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit en jugeant que la méconnaissance par le projet des dispositions du I de l’article L. 146-4 du code de l’urbanisme ne devait s’apprécier qu’au regard des circonstances prévalant à la date du permis d’aménager initial accordé le 29 août 2011, sans qu’ait d’incidence la délivrance d’un permis modificatif par l’arrêté du 2 juillet 2018.
7. En outre, si la cour a précisé que l’appréciation du respect du I de l’article L. 146-4 du code de l’urbanisme qu’elle a opérée au regard de l’environnement du projet à la date du permis d’aménager initial valait » même à celle du permis modificatif « , il ressort des pièces des dossiers qui lui étaient soumis que le projet litigieux, qui consiste à aménager des parcelles localisées sur une friche industrielle, se trouve aux abords immédiats d’une usine, en continuité de la zone d’aménagement concerté du Domaine du Chemins des Près, elle-même en continuité d’une zone déjà urbanisée située à l’est du territoire de la commune d’Etaples-sur-Mer. En jugeant que, même à la date du permis modificatif, la densité des constructions de la zone d’aménagement concerté n’était pas significative et que le projet ne se trouvait pas en continuité d’une agglomération existante, la cour a dénaturé les faits de l’espèce ».